Wednesday, 29 April 2020

Crise alimentaire - la dimension géopolitique de la nourriture

Crise alimentaire - la dimension géopolitique de la nourriture

 

By Rashid Jogee 

 

Le Mauricien, 29 mai 2008 (Île Maurice)



Depuis plusieurs semaines, la crise alimentaire mondiale occupe la première place dans les médias du monde entier. Les prix des denrées alimentaires de base - blé, maïs, riz - connaissent une augmentation exponentielle, allant jusqu'à 200%.

Ces aliments se font rares. Plusieurs gros pays exportateurs ont pris la décision d'en interdire l'exportation afin de subvenir aux besoins de leurs propres habitants.

Le manque de nourriture et l'impossibilité d'en acheter à cause de l'augmentation des prix ont provoqué des émeutes dans une vingtaine de pays : le Bangladesh ; l'Egypte ; le Burkina Faso ; la Côte d'Ivoire ; le Pakistan et la Thaïlande, entre autres. À Haïti, des gens affamés ont mis à sac Port-au-Prince. La riposte de l'armée onusienne a fait des dizaines de morts. Ventre affamé rend fou. Nulle barrière ne pourrait empêcher celui qui a faim de détruire tout obstacle sur son passage à la recherche d'aliments pour lui-même et pour sa famille.

Les raisons avancées


Diverses raisons sont mises en avant pour expliquer ce soudain manque de nourriture et leur renchérissement. La hausse du prix du pétrole met les engrais dérivés du pétrole hors de portée des planteurs. Le fret représente un poids énorme dans le prix des aliments.

Les problèmes liés au changement climatique jouent leur rôle - inondation, dans un certain nombre de pays, tels la Chine ; sécheresse qui perdure dans d'autres pays, tels l'Australie.

On ne manque pas de faire ressortir que les Indiens et les Chinois mangent davantage qu'auparavant, oubliant que l'Américain moyen dévore, en un repas, bien plus que ce que le pauvre dans un pays du tiers-monde arrive à se procurer après un quart de mois de travail. Pour le riche, cela se traduit par un gros problème d'obésité et de maladies associées.

Le tout aggravé par la décision de l'Europe et des Etats-Unis de consacrer de grandes étendues de leur terre arable à la culture céréalière en vue de la production de biocarburant.

Les pays riches trouvent tout à fait normal qu'au lieu de nourrir l'homme, on nourrisse des moteurs de véhicules, rapporteurs d'argent.

Ce n'est pas sans raison que Jean Ziegler, le rapporteur Spécial des Nations unies pour le Droit à l'alimentation, qualifie de tels actes de crime contre l'humanité.

On n'oubliera pas non plus l'action des spéculateurs qui, à la suite de l'effondrement des marchés financiers, ont placé leur argent sur les denrées alimentaires. Ils ont créé une pénurie artificielle afin de récolter de gros profits.

Dimension géopolitique


Qui contrôle l'énergie contrôle l'économie du monde. C'est pour cette raison que les Etats-Unis ont établi plus de huit cents bases militaires à travers le monde afin de contrôler la production énergétique, pour protéger la route du pétrole. En 1953, la CIA avait organisé un coup d'état contre le premier ministre iranien, le Dr Mohammad Mossadegh, qui avait osé nationaliser la production pétrolière de son pays. L'occupation de l'Irak n'a pas d'autres raisons que le contrôle du troisième producteur mondial de pétrole. L'Iran, bien que plus puissant que l'Irak, court le risque d'être lui aussi attaqué puisqu'il est le deuxième producteur mondial. Le premier producteur, l'Arabie Saoudite, est déjà sous le diktat de Washington.

Mais les Etats-Unis, dans leur quête de devenir l'unique super puissance et de créer un empire, ont compris, depuis les années 70, que celui qui contrôlera la production alimentaire contrôlera la population du monde.

Le Secrétaire d'Etat à l'agriculture, Earl Butz, du cabinet de Nixon, ne pouvait être plus clair quand il affirma :

"Hungry men listen only to those who have a piece of bread. Food is a tool. It is a weapon in the US negociating kit."

Cela fait écho à ce qu'avait dit le vice-président Hubert Humphrey : " If you are looking for a way to get people to lean on you, food dependence would be terrific. " Depuis, toute la politique américaine est concentrée sur la création d'une hégémonie américaine de la production agricole. Si le gouvernement américain n'intervient pas directement militairement comme dans le cas du pétrole, il a déployé une armée différente comprenant de puissantes corporations transnationales telles Cargyle, Dupont, Syngenta et, surtout, Monsanto.

Les institutions internationales à la solde des Etats-Unis, comme le FMI, la BM et l'OMC, jouent un rôle primordial pour mettre le grappin sur les terres et la production alimentaire des pays du tiers-monde.

Le FMI, la BM


Ces apôtres de l'ultra-libéralisme dans le commerce mondial ont écrit, depuis de nombreuses années, le scénario de cette catastrophe alimentaire dont nous sommes les témoins aujourd'hui. Plus de 90 pays, principalement des pays en voie de développement, ayant eu recours aux services des FMI/BM pour des emprunts, se sont retrouvés avec une imposition d'Ajustement structurel. Il s'agit d'une approche One Size Fits All : l'abolition de subsides pour les petits fermiers ; la libéralisation des prix ; l'abolition des barrières commerciales ; la privatisation et ainsi l'ouverture des terres aux grandes corporations transnationales. Cette politique est présentée comme une panacée qui sert à résoudre le problème d'efficience et de productivité. Tout cela n'est qu'un leurre dont le but est de dépouiller les petits fermiers de leurs terres. Sans protection, ils ne peuvent concurrencer les grandes corporations bénéficiant grassement des subsides américains et européens. Ces pays riches ferment leurs frontières mais exigent des pays du tiers-monde qu'ils ouvrent les leurs.

Fais ce que je dis, mais ne fais pas ce que je fais. Résultat : le nombre élevé de suicides parmi les petits fermiers ruinés en Inde et dans d'autres pays en voie de développement. L'agriculture paysanne a été abandonnée. On privilégie les cultures industrielles. Les bailleurs de fonds n'investissent plus dans l'agriculture paysanne.

Monsanto, OGM et OMC


Dans l'arsenal américain pour le contrôle mondial de l'agriculture, les Organismes génétiquement modifiés (OGM) jouent un rôle clé. Les Américains présentent les OGM comme le salut, le seul moyen de nourrir une population mondiale qui est en train de croître rapidement. Les pressions pour faire accepter les produits génétiquement modifiés sont faites de façon ouverte ou subtile. L'aide alimentaire à des populations affamées ne se fera qu'à travers des OGM.

D'autre part, depuis longtemps la Rockefeller Foundation joue un rôle déterminant dans la recherche et la promotion des OGM. La Rockefeller Foundation a établi des centres de Recherche dans les pays en voie de développement et offre des bourses pour la formation de généticiens agricoles. Cette fondation opère en proche collaboration avec la Banque mondiale, le gouvernement américain et les corporations géantes de l'agro-industrie telles Monsanto.

Derrière toute cette campagne de recherche génétique sur les semences et les plantes se profile l'intention de breveter le patrimoine naturel et génétique mondial. Nous nous retrouvons devant une stratégie délibérée de contrôler et de dominer la culture des aliments de base à travers le monde.

Le géant transnational Monsanto contrôle 90% des semences génétiquement modifiées - riz, maïs, soja, blé. Il est responsable, dans une grande mesure, de la destruction de l'agriculture traditionnelle. Ce grand pollueur de la planète, ce producteur de la fameuse dioxine, l'Agent Orange, qui a été utilisée par l'armée américaine pour détruire le Vietnam, est responsable aujourd'hui du développement des semences suicides, le Terminator.

Les graines provenant de ces plantes génétiquement modifiées deviennent stériles. On ne peut les replanter. Ainsi, il faudra acheter chaque année des semences de Monsanto. D'autre part, pour le traitement de ces champs d'OGM, on fera appel à un herbicide spécial fabriqué par Monsanto.

Même quand les semences OGM ne sont pas stériles, le fermier n'a aucun droit de les replanter si les redevances ne sont pas payées.

L'OMC, ce gendarme au service des corporations géantes, fort de l'accord connu comme TRIPS (Trade Related Aspects of Intellectual Property Rights), lequel accord a été ratifié par la majorité des pays sous pression américaine, veille à ce que les agriculteurs payent des redevances pour les semences brevetées. Les gouvernements redoutent les sanctions que peut prendre l'OMC.

C'est la faillite assurée de l'agriculture traditionnelle.

La barbarie à son apogée.

Nous constatons aujourd'hui un retour vers les pires moments de la période barbare de l'histoire. On se servait de la nourriture comme arme pour assiéger un fort, une ville. Mais aujourd'hui, pour asseoir son hégémonie planétaire, c'est toute la population mondiale qui est prise en otage.

Sunday, 26 April 2020

Enseigner l’Histoire de Maurice à nos Enfants

Enseigner l’Histoire de Maurice à nos Enfants

 

By Joseph Tsang Mang Kin

 

Mauritius Times, 29 June 2012 (Mauritius)



Tout étudiant en science politique ou tout simplement le citoyen qui observe notre vie politique quotidienne, ne peut pas ne pas être intrigué par un phénomène récurrent qui semble collé à notre Histoire depuis 1983: le pays semble être condamné à assister aux mariages, divorces et remariages de serial divorcés. Où les noceurs ne se demandent même pas la peine de savoir s’ils s’aiment ou pas, mais ce qui est certain, c’est qu’ils se détestent et ne se font nullement confiance. Et les citoyens-enfants sont tenus d’assister à d’éternels remakes sans avoir leur mot à dire. « Sois stupide et tais-toi ! »


Et si on ne voulait plus se taire ou cesser d’être des idiots ! Comment faire ? Question certes facile, mais les réponses pas si faciles à trouver. Pour essayer d’y voir clair, voyons ce qui se passe autour de nous, en ce moment. Il y a l’initiative de Jack Bizlall qui réunit des hommes et des femmes qui réfléchissent et constituent un réseau d’intellectuels qui ont à cœur l’avenir du pays. Il y a également Shafick Osman qui réunit des citoyens qui ont des choses à dire ou d’autres qui veulent en savoir, chaque jeudi après-midi dans sa librairie de Rose-Hill. Je lui ai fait la réflexion qu’il serait en train de monter un nouveau Club des Etudiants, mais espérons qu’il devienne un Club d’Agissants.


Il y a également Shafick Osman qui réunit des citoyens qui ont des choses à dire ou d’autres qui veulent en savoir, chaque jeudi après-midi dans sa librairie de Rose-Hill. Je lui ai fait la réflexion qu’il serait en train de monter un nouveau Club des Etudiants, mais espérons qu’il devienne un Club d’Agissants.


C’est sain et encourageant, tout cela. Et voilà que nous voyons agir et non pas seulement réfléchir des citoyens qui s’interrogent, comme Roshi Badhain qui n’hésite pas à pointer du doigt telle pratique de silence et d’opacité dans la gestion de tel dossier. C’est un début : c’est un commencement. Cela veut dire qu’il nous faut un Freedom of Information Act à la manière des Etats-Unis où on essaie de traiter les affaires qui nous concernent tous dans la transparence.


Lire la suite sur le site internet de Mauritius Times

Papa : le lendemain

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