By Shafick Osman
Quand nous avons eu la nouvelle, sur WhatsApp, jeudi soir (heure d'Ontario), nous étions tellement secoués que nous nous sommes mis à douter qu'il s'agissait bien de l'Aboo Rawat que nous avons connu, à Beau Bassin ! Ayant la même nouvelle d'une autre source, nous avons dû nous résigner à accepter la très triste réalité - إِنَّا لِلَّٰهِ وَإِنَّا إِلَيْهِ رَاجِعُونَ, (ʾinnā li-llāhi wa-ʾinna ʾilayhi rājiʿūn).
Nous avons connu le frère Aboo - Aboobakar de son prénom complet - dans les années 80, à la mosquée Bait-ul-Muqaddas, à Beau Bassin, connue aussi comme masjid Barkly car se trouvant… à la rue Barkly. Notre plus lointain souvenir remonte à 1986, quand le compte-rendu d'une conférence du groupe de jeunes Les Nouveaux Chébrans fut publié dans le quotidien Le Mauricien, à la page 2, autant que nous nous souvenons. Il avait ralenti sa voiture, à la rue Barkly précisément, pour nous féliciter ! Il était sincère, joyeux, et nous encouragea à poursuivre le cheminement.
En revanche, quelque temps après notre mariage, en octobre 1998, il n’était pas très content et il nous l’avait fait savoir. Il n’était pas content que notre mariage ait été à la une de l’hebdomadaire Star en soutenant ses dires par des commentaires forts pertinents. Nous étions d’accord avec lui mais comme il entrait à la mosquée et que nous étions occupés à enlever nos chaussures, sur un des bancs, nous n’avons pu lui répondre. Nous nous sommes toujours dit que nous allons lui dire que ce n’était pas nous qui avons médiatisé l’affaire mais que cela venait d’un ami, proche du journal, sans que nous soyons au courant. Malheureusement, et Dieu l’a voulu ainsi, 22 ans après, nous n’avons pu lui préciser cela malgré que nous nous sommes vus des centaines de fois depuis !
Le gentilhomme
Le frère Aboo était d’une gentillesse extraordinaire, d’une amabilité exemplaire. Il ne ratait jamais l’occasion de vous saluer, à la mosquée ou dans la rue, et il se donnait toujours la peine de déposer telle personne ou tel muswalli, venant à la mosquée, chez lui, dans sa voiture toujours très propre, avec, bien évidemment, le brin de causette traditionnel ou ses blagues souvent, au second degré, qu’on prenait une seconde ou deux pour comprendre.
Mais Aboo Rawat, c’était aussi le gentleman ! Un gentilhomme qui donnait l’air de ne rien négliger – toujours tiré à quatre épingles, légendairement élégant dans ses choix vestimentaires, généralement agacé par la négligence des autres. Son franc-parler avait du poids mais il restait toujours poli, courtois. Il nous donnait l’air de quelqu’un de patient aussi.
Un gentilhomme qui donnait l’air de ne rien négliger – toujours tiré à quatre épingles, légendairement élégant dans ses choix vestimentaires
Et c’est grâce à Aboo Rawat que, lors d’un cyclone de classe 3, nous avons eu le privilège de diriger la prière, à la mosquée Al-Mufareedeen, toujours à Beau Bassin, connue, elle, comme masjid Balfour. Si notre mémoire ne nous fait pas défaut, c’était pour la prière de la mi-journée (Dohr). Seuls lui, son frère et moi, étions à la mosquée. Au moment de commencer la prière, nous lui indiquâmes de prendre la place de l’imam mais il refusa. Il insista pour que nous dirigions cette prière. Nous la fîmes et ce fut la seule et unique fois que nous avions eu cette prérogative, dans cette mosquée.
Célibataire, le frère Aboo était le jeune frère du renommé Dr Ibrahim Rawat, chirurgien, et le frère de l’autre renommé Hassam Moussa Rawat, le pionnier des équipements modernes de boulangerie et de pâtisserie, à Maurice. Aboo Rawat était très proche de sa famille, de ses frères, et portait une attention particulière à ses neveux Ameen et Ali, dirigeants aujourd’hui du puissant groupe HM Rawat.
Notre grande satisfaction est que nous avons pu lui dire au-revoir, avant de quitter Maurice, voici un peu plus de deux ans - il avait l'air d'être un peu choqué, par ailleurs, de l'annonce. Le frère Aboo a bien connu notre père mais aussi notre oncle (chacha) Ayoub de la rue Walter Besant, à Beau Bassin.
Fidèle des mosquées, nous ne pouvons que souhaiter que Dieu lui accorde la paix dans l’au-delà et la meilleure des places, au Paradis – Amen !
No comments:
Post a Comment