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Curtis César va laisser pendant un an sa famille, dont sa fille Tatiana
qui se présente cette année au CPE, pour faire un « travail de pionnier ». (Source : L'Express, 8 janvier 2008) |
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Kemlall Bhoowabul souhaite être «partie prenante» du projet. (Source : L'Express, 8 janvier 2008) |
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Les jeunes d’Agalega pourront continuer à jouer sur leur île tout en allant au collège. (Source : L'Express, 8 janvier 2008) |
L'Express, 8 janvier 2008
PREMIER COLLEGE
Le défi des professeurs à Agalega
Pour la première fois, Agalega accueille ses élèves au secondaire. Les trois professeurs qui ont été recrutés pour enseigner dans ce nouveau collège témoignent. Entrela « rétribution intéressante », et le challenge, ils balancent.
Jusqu’à l’an dernier, à Agalega, la rentrée des classes se limitait au primaire. Cette année, ce sera différent. 2008 marque un tournant. Pas de mères angoissées qui regardent partir pour Maurice leurs enfants d’à peine 11 ans, ni d’enfants déchirés entre l’envie de poursuivre leur scolarité et le refus de se séparer de leur famille. Le 10 janvier, pour la première fois, une quinzaine d’adolescents agaléens, de 11 à 15 ans, débuteront leur cycle secondaire sur leur île.
Cette année, seule la Form I fonctionnera. Le transit shed de l’île du Nord a été aménagé en salles de classe. Des pupitres, chaises, tableaux et ordinateurs ont déjà été acheminés vers Agalega depuis novembre.
Les professeurs, eux, au nombre de trois, mettent le cap sur l’île ce matin à bord du Dornier. Ils y resteront un an. Un an, cela peut paraître long, lorsque l’on est loin de sa famille, que l’on doit renoncer à ses habitudes et son confort pour s’adapter à un environnement différent. Mais un an, cela peut également paraître court, lorsque l’on a une «mission» à accomplir. Dans le cas présent, un collège à mettre en place. Faire de l’Agalega Lower Secondary School une réalité, c’est le défi que Kemlall Bhoowabul, Chanda Bholah et Curtis César ont décidé de relever.
Jamais mis les pieds
Lorsque Mauritius Educational Co. Ltd, organisme qui gère les collèges Medco à Maurice, lance, lors du troisième trimestre l’an dernier, un appel à candidatures interne pour recruter des professeurs pour enseigner à Agalega, une vingtaine répond à l’appel. Après un entretien, trois sont choisis. Aucun n’a jamais mis les pieds à Agalega. Ils ont déjà côtoyé des élèves originaires d’Agalega durant leur carrière, longue de deux ou trois décennies, et sont au courant des difficultés que rencontrent ces adolescents lorsqu’ils doivent venir poursuivre leur scolarité à Maurice. Cela doit changer, ils veulent y contribuer.
Mais s’exiler pour un an, cela comprend des sacrifices. Qu’est-ce qui peut bien motiver ces trois enseignants ? «Il y a certes des sacrifices à faire mais tout nouveau projet a un prix», soutient Kemlall Bhoowabul. Peut-être bien celui des «disturbance allowance» ? Si Kemlall Bhoowabul le consent du bout des lèvres, Chanda Bholah, lui, soutient que ce sont avant tout ces indemnités qui l’ont motivé à partir. «C’est un sacrifice que nous faisons que de quitter notre famille mais les indemnités, qui représentent presque 50 % de notre salaire, sont très intéressantes et encourageantes.»
Ils ne chômeront pas
Outre l’aspect pécuniaire, Chanda Bholah trouve que c’est «une très bonne idée» que de mettre en place un collège à Agalega. «C’est dans l’intérêt des Agaléens.» Kemlall Bhoowabul ajoute que le projet est «stimulant» et qu’il souhaite en être «partie prenante». Curtis César, lui, dit qu’il fera de son mieux pour accomplir «quelque chose dont je serai fier plus tard».
Tous sont d’avis que ce qu’ils s’apprêtent à accomplir est «un défi». «A Maurice, il y a des collèges bien établis. Là-bas, nous avons un travail de pionnier à faire. Je serai fier d’avoir été parmi les premiers à le faire. Nous allons partager nos connaissances avec les jeunes Agaléens afin qu’ils puissent devenir autonomes», soutient Curtis César.
Ce professeur de design quitte derrière lui deux enfants en bas âge. Sa fille Tatiana se présentera cette année aux examens du Certificate of Primary Education (CPE). Lui qui pensait partir en famille a dû revoir ses plans. D’une part parce que sa fille, justement, se présente au CPE, mais aussi parce qu’il n’y a pas suffisamment de place pour loger toute une famille. «Ce n’est pas facile mais j’ai déjà pris ma décision. Il faut aller de l’avant. Je téléphonerai souvent pour voir si tout va bien.» Les deux autres enseignants aussi doivent consentir à ce sacrifice. A regrets.
Mais à Agalega, ils seront très occupés. De l’emploi du temps à établir, au programme scolaire à définir en passant par la maintenance des ordinateurs, l’organisation des activités extrascolaires et l’accompagnement des élèves ainsi que des parents, ils ne chômeront pas. Le premier trimestre leur permettra d’évaluer le niveau des élèves. Au programme des cours, anglais, français, mathématiques, sciences, design mais aussi agriculture et travaux manuels. Une délégation du ministère de l’Education devrait se rendre à Agalega en avril afin d’évaluer le travail accompli.
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